Chaque jour se lève tandis que le temps semble s'écouler plus lentement alors même que son cours a entamé son sprint final dans une discrète hypocrisie. Vieillir. Pour Jacques, chaque aurore est synonyme de la continuation de la sempiternelle cyclique routine qu'est depuis longtemps devenue sa vie. Une fois levé, il enfile machinalement toujours les mêmes gestes devenus pour lui rites dans le plus sacré des rituels, celui du quotidien. Ses douches, ses déjeuners, ses marches matinales comme couplets dans la lancinante chanson de sa vie ayant pour refrain son travail.
Toujours arrivé à la même heure au boulot, comme si trafic ou tracas étaient impératifs qui lui était épargnés, la vie jugeant lui affliger déjà assez de sourdes souffrances de par sa lassitude, il fume sur le porche de l'usine, saluant discrètement chacun de ses collègues. Il exhale lentement sa nocive fumée en scrutant le ciel comme s'il pouvait y apercevoir la trace d'une promesse encore en suspend.
Jacques est petit, l'échine courbé comme si le poids des jours avait été trop lourd fardeau à supporter pour un seul homme. L'air un peu hagard, il a un teint mât, un regard scrutateur, une attitude résiliée. Il est discret, sans doute timide. Il est habité d'une bonté sans borne. Une bonté pure n'empruntant rien à la bonhomie ou à la pitié, une bienveillance masquée par sa prenante gêne.
Alors même que sa présence est difficilement perceptible, ceux qui le connaissent sont à même de percevoir un aura de sympathie, saisir l'éclat du respect dans son regard, l'amour dans son attitude. Il parle peu et doucement, comme s'il avait compris depuis longtemps que les grands discours prenaient force n'ont pas dans le ton ou la quantité mais bien dans l'essence des mots choisis et dans le raffinement de cette dernière. C'est pourquoi lorsqu'il ouvrait la bouche, on tendait l'oreille, plein de félicité d'avoir la chance de saisir once de sagesse.
Jacques vit seul. Marié jeune, sa femme l'avait quitté rapidement, victime d'une mort subite. Comme quoi la Justice ne doit pas avoir lieu ici bas. Sans enfant, il a toujours vécu dans la solitude d'un appartement aujourd'hui si imprégné de sa personne qu'il semble sot de croire que quelqu'un d'autre puisse un jour y loger. Sur son four, une vieille bouilloire de porcelaine qui a dû lui servir à faire des milliers de thés. Dans son salon, un vieux téléviseur dont les couleurs évoquent le morbide. Dans sa chambre, quelques vieilles photos jaunies. Tant d'objet reliques d'une vie menée dans l'indifférence collective.
Un jour, la mort permettra à Jacques d'aller rejoindre sa douce. Et tandis que son âme quittera cette Terre, enfin libérée de sa prison quotidienne, son corps, lui, sera bien seul. Employé d'usine toute sa vie, sans enfant, inexistante seront les mémoires qu'il laissera. Dans le plus profond malheur de l'humanité, il sera enterré dans la plus grande inappétence. Rapidement, tous souvenirs de lui s'envoleront comme trop légères voluptés et ainsi, sa lourde existence reléguée aux oubliettes car trop peu de gens auront pris le temps, un instant, de découvrir ce discret joyau.
Toujours arrivé à la même heure au boulot, comme si trafic ou tracas étaient impératifs qui lui était épargnés, la vie jugeant lui affliger déjà assez de sourdes souffrances de par sa lassitude, il fume sur le porche de l'usine, saluant discrètement chacun de ses collègues. Il exhale lentement sa nocive fumée en scrutant le ciel comme s'il pouvait y apercevoir la trace d'une promesse encore en suspend.
Jacques est petit, l'échine courbé comme si le poids des jours avait été trop lourd fardeau à supporter pour un seul homme. L'air un peu hagard, il a un teint mât, un regard scrutateur, une attitude résiliée. Il est discret, sans doute timide. Il est habité d'une bonté sans borne. Une bonté pure n'empruntant rien à la bonhomie ou à la pitié, une bienveillance masquée par sa prenante gêne.
Alors même que sa présence est difficilement perceptible, ceux qui le connaissent sont à même de percevoir un aura de sympathie, saisir l'éclat du respect dans son regard, l'amour dans son attitude. Il parle peu et doucement, comme s'il avait compris depuis longtemps que les grands discours prenaient force n'ont pas dans le ton ou la quantité mais bien dans l'essence des mots choisis et dans le raffinement de cette dernière. C'est pourquoi lorsqu'il ouvrait la bouche, on tendait l'oreille, plein de félicité d'avoir la chance de saisir once de sagesse.
Jacques vit seul. Marié jeune, sa femme l'avait quitté rapidement, victime d'une mort subite. Comme quoi la Justice ne doit pas avoir lieu ici bas. Sans enfant, il a toujours vécu dans la solitude d'un appartement aujourd'hui si imprégné de sa personne qu'il semble sot de croire que quelqu'un d'autre puisse un jour y loger. Sur son four, une vieille bouilloire de porcelaine qui a dû lui servir à faire des milliers de thés. Dans son salon, un vieux téléviseur dont les couleurs évoquent le morbide. Dans sa chambre, quelques vieilles photos jaunies. Tant d'objet reliques d'une vie menée dans l'indifférence collective.
Un jour, la mort permettra à Jacques d'aller rejoindre sa douce. Et tandis que son âme quittera cette Terre, enfin libérée de sa prison quotidienne, son corps, lui, sera bien seul. Employé d'usine toute sa vie, sans enfant, inexistante seront les mémoires qu'il laissera. Dans le plus profond malheur de l'humanité, il sera enterré dans la plus grande inappétence. Rapidement, tous souvenirs de lui s'envoleront comme trop légères voluptés et ainsi, sa lourde existence reléguée aux oubliettes car trop peu de gens auront pris le temps, un instant, de découvrir ce discret joyau.
11 commentaires:
YES, YES, YES, YESSSSSSS!! Ah, j'en reviens pas! T'AS TOUT LE TALENT POUR ÉCRIRE! TOUT!
Ça te prends juste du carburant... Tu y es presque !!! AAAAAH... que je suis heureuse.
Faut pas t'essoufler...
C'est normal...
C'est si agréable...
T'es capable!
Lâche pas...
Reprends...
Encore
Continue!
YESSSSSS!
*rien de sexuel ici*
Tu me le présenteras, m'a y changer les idées... m'a l'amener à La Ronde...
Question de mettre un peu de piquant dans sa routine...
;)
@maryse: Restons calme.
@kattykane: J'y vais en fin de semaine, à la Ronde. Malheuresement ma T-Mobile est déjà fullé, malheureusement pour Jacques.
Sti... moi je vais à La Ronde le 1er juillet... On aurait du mieux timer nos affaires et hurler dans le Monstre ensemble!!!
;)
Wow....ce billet me touche beaucoup, sûrement car il y a tellement de gens seuls autour de nous et qu'on ne s'en rends pas toujours compte.
Ça me fait toujours un pincement au coeur voir un vieil homme ou une vieille dame seul(e)... : (
Tu écris vraiment bien en tout cas!
Bonne fin de semaine à la Ronde chanceux!
Caro C
Viens ici que je te tape dans le dos! Bordel! Tu as vraiment du talent.
C'est quand je lis des textes comme celui-là (qui sont très nombreux sur ton blog en passant) que je me dis que j'adore te lire! Continue!
@caro: C'est vrai que ça fait un pincement au coeur. Moi ça me rend véritablement triste tant de solitude.
@volage: Merci de la tape dans le dos haha, ça motive.
@marie: Merci aussi des bons mots, et merci de prendre du temps pour me lire, c'est toujours apprécié.
J'pensais que ca l'allait parler de gazon pis du gars qui lave sa tondeuse a CHAQUE fois qui la fait pis qui veut pas qu'on pile dessus ou qui appelle chez les voisins pour leur dire que leur enfant est sur son gazon en pleine hiver. Bref, je suis décu.
Très bon texte par contre.
^^^ commentaire approuvé ^^^
Merci pour tous ces conseils, je vais essayer de les appliquer !
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