C'est aujourd'hui que se termine l'épopée Royaume du Pain. Après un peu plus de 4 mois, je quittais ce soir cet emploi qui m'a rendu moribond, léthargique et désagréable en ce pluvieux été. Je relisais mes textes portant sur la chose (ça a toujours bien ça de positif ce truc de blog) et je réalise qu'ils sont tous teintés de négatif ce qui, au final, ne reflète peut-être pas entièrement l'expérience. Parce qu'au fond, c'était aussi un peu ça, une expérience, une aventure dans le monde usinier qui m'était inconnu, l'opportunité de me procurer l'émerveillement perpétuel des stimulis divers que sauront m'offrir mes emplois futurs. J'ai été négatif mais ça a également eu du bien. Je m'élancerai donc dans le positif, le noir saura bien s'immiscer éventuellement.
En quatre mois, j'ai rencontré des dizaines de nouvelles personnes, de quoi secouer un peu le marasme social dans lequel je me vautre grassement. J'ai pu expérimenter le travail de soir, de nuit. J'ai rencontré des gens qui vivent, qui réfléchissent peu, savourent des trucs banals. Un hédonisme simpliste et inconscient, un mode de vie riche dans sa pauvreté. Quelque chose de saisissant qui m'inspire. J'ai parlé à des pères qui me parlaient de leurs enfants avec une lueur particulière dans les yeux. Ça m'a rappelé combien je veux un jour vivre cette joie, celle de la riche paternité. J'ai vu un homme devenir grand-père, son quotidien devenir plus léger, son sourire plus aisé, l'espace d'un bon bout de temps.
J'ai appris que parmi plusieurs colons qui s'encrassent dans un usine, il y a des intelligents, des perspicaces, des articulés. Dans le milieu d'une mare de je m'en foutisme, il y en a qui se préoccupe, s'intéresse.
J'ai aussi rencontré des jeunes sympathiques, je suis monté à La Ronde avec certains, rigolé avec d'autres. Bien sûr, il y avait bien des lâches et des idiots, mais aussi quelques uns qui valaient la peine et globalement, c'est ça qui compte.
J'ai aussi découvert un milieu de travaillants. Des gens qui avaient 2 jobs, qui travaillaient la fin de semaine, qui passaient les publi-sac, bossaient sur leurs terres. Les gens s'arrangent pour arriver, se démènent comme des diables dans l'eau bénite ou comme des anges prisonniers d'un enfer de pain. Ça m'a impressionné.
Aujourd'hui j'ai quitté mon emploi. J'ai serré des mains, on m'a souhaité bonne chance, on s'est intéressé à mon champ d'études, mon avenir, celui qu'ils considèrent avoir perdu en si grand nombre. Je trouvais bizarre de songer que je faisais une action pour la dernière fois après l'avoir fait 2-300 fois durant l'été. Que dire de ceux qui la font depuis 20 ans. Ça aide à rester humble. Comme à chaque fois qu'à un stade de ma vie je quitte quelque chose, école, travail, relation, même si je ne m'y plaisais guère, je suis pris de nostalgie au moment du départ.
Alors que je vidais ma case, mon boss est venu me parler. Tandis qu'il me disait combien il m'avait trouvé travaillant, bon p'tit gars, que ça en prendrait plus comme moi et que j'étais le bienvenue n'importe quand, vraiment n'importe quand pour revenir, j'ai pogné quelque chose. Comme un moton dans la gorge. C'est mou mais je suis comme ça. J'oubliais les heures à rager, à être sidéré par l'hypocrisie entre collègues (qui n'est guère différente de celle qui règne partout), les engueulades monstres à propos de balais. J'étais là et j'étais triste, pour vrai, j'avais la gorge nouée.
En quatre mois, j'ai rencontré des dizaines de nouvelles personnes, de quoi secouer un peu le marasme social dans lequel je me vautre grassement. J'ai pu expérimenter le travail de soir, de nuit. J'ai rencontré des gens qui vivent, qui réfléchissent peu, savourent des trucs banals. Un hédonisme simpliste et inconscient, un mode de vie riche dans sa pauvreté. Quelque chose de saisissant qui m'inspire. J'ai parlé à des pères qui me parlaient de leurs enfants avec une lueur particulière dans les yeux. Ça m'a rappelé combien je veux un jour vivre cette joie, celle de la riche paternité. J'ai vu un homme devenir grand-père, son quotidien devenir plus léger, son sourire plus aisé, l'espace d'un bon bout de temps.
J'ai appris que parmi plusieurs colons qui s'encrassent dans un usine, il y a des intelligents, des perspicaces, des articulés. Dans le milieu d'une mare de je m'en foutisme, il y en a qui se préoccupe, s'intéresse.
J'ai aussi rencontré des jeunes sympathiques, je suis monté à La Ronde avec certains, rigolé avec d'autres. Bien sûr, il y avait bien des lâches et des idiots, mais aussi quelques uns qui valaient la peine et globalement, c'est ça qui compte.
J'ai aussi découvert un milieu de travaillants. Des gens qui avaient 2 jobs, qui travaillaient la fin de semaine, qui passaient les publi-sac, bossaient sur leurs terres. Les gens s'arrangent pour arriver, se démènent comme des diables dans l'eau bénite ou comme des anges prisonniers d'un enfer de pain. Ça m'a impressionné.
Aujourd'hui j'ai quitté mon emploi. J'ai serré des mains, on m'a souhaité bonne chance, on s'est intéressé à mon champ d'études, mon avenir, celui qu'ils considèrent avoir perdu en si grand nombre. Je trouvais bizarre de songer que je faisais une action pour la dernière fois après l'avoir fait 2-300 fois durant l'été. Que dire de ceux qui la font depuis 20 ans. Ça aide à rester humble. Comme à chaque fois qu'à un stade de ma vie je quitte quelque chose, école, travail, relation, même si je ne m'y plaisais guère, je suis pris de nostalgie au moment du départ.
Alors que je vidais ma case, mon boss est venu me parler. Tandis qu'il me disait combien il m'avait trouvé travaillant, bon p'tit gars, que ça en prendrait plus comme moi et que j'étais le bienvenue n'importe quand, vraiment n'importe quand pour revenir, j'ai pogné quelque chose. Comme un moton dans la gorge. C'est mou mais je suis comme ça. J'oubliais les heures à rager, à être sidéré par l'hypocrisie entre collègues (qui n'est guère différente de celle qui règne partout), les engueulades monstres à propos de balais. J'étais là et j'étais triste, pour vrai, j'avais la gorge nouée.
Je suis moumoune.
C'est que je m'attache aux gens. J'ai ce défaut. Ça et celui de bien être conscient quand quelque chose se termine, de son inexorable finalité. Je sais donc dès lors que ces gens auxquels je me suis lié, je ne les reverrai plus. C'est un univers que j'ai apprivoisé que je quitte.
Et tandis que je m'en allais vers ma T-Mobile, botte de travail sous le bras, je me suis retourné pour jeté un dernier coup d'oeil à la bâtisse, m'enivrant d'une dernière effluve de pain qui s'échappait nonchalamment de l'édifice rappelant pénitencier, j'ai pogné un petit quelque chose. Malgré tout.
Et tandis que je m'en allais vers ma T-Mobile, botte de travail sous le bras, je me suis retourné pour jeté un dernier coup d'oeil à la bâtisse, m'enivrant d'une dernière effluve de pain qui s'échappait nonchalamment de l'édifice rappelant pénitencier, j'ai pogné un petit quelque chose. Malgré tout.
12 commentaires:
C'est normal de s'attacher à des gens qu'on côtoie à tous les jours, même si ça ne fait que 4 mois que tu travaillais là. Il y a des gens avec qui tu as peut-être trouvé des affinités qui te poussais (peut-être) à te donner un once de courage pour aller travailler.
Car faire ce que tu as fais, durant un été, maudit que t'es bon.
Avoir évité les mots "Je suis moumoune" et "mou", j'aurais adoré l'expérience de lecture de ce texte. Tu y vas comme tu le sens après tout...
@bleue: J'imagine que c'est normal, même si je trouve ça irrationnel de m'attacher pour si peu. Pour ce qui est d'être bon de toughé, moi ce qui m'impressionne, c'est ceux qui font ça depuis 15-20 ans pour mettre de la bouffe sur la table de leur famille.
@maryse: Qu'est-ce que tu veux, pogner le moton pour ça, je me trouve fillette.
faut savoir trouvé des p'tits bonheurs et ceux qui "beg to differ" dans la dureté de la vie...
Une bien belle expérience que tu as vécue mon jeune homme. La vie c'Est comme un croissant, au bout, c'est croustillant et tendre en dedans, de plus, tu sais jamais quoi tu vas pogner, comme quand tu commences à manger un croissant pis que tu te rends compte à la 2e bouchée qu'il est aux amandes, tu dois passer à travers des épreuves malgré tout... A+ DUDE
Jean-Paul Sartre
La fin d'une aventure qui marque le début de plein de belles choses à venir. Bon succès dans tout, la santé, une belle tite blonde pis un char neuf.
Pourquoi c'est un défaut s'attacher aux gens?
J'dirais plutôt que c'est la gestion de la coupure avec eux qui rend triste. Parce que sinon, c'est pas MAL d'aimer les humains :)
J'ai rarement été aussi inspiré que quand mon grand-père est mort. Il avait travaillé bien plus de 50 ans sur des terres, dans le bois, dans les usines, parfois parti longtemps sans voir sa petite famille. À plus de 80 ans, après des années de maladie, il arborait toujours une musculature qui ne faisait qu'esquisser le portrait d'une vie de labeur physique sans relâche.
J'ai travaillé dans une usine et la perspective d'une vie dans ce milieu représente un poids de mesure inhumaine. C'est là que ca m'a frappé, que j'ai réalisé à quel point il venait de redéfinir le mot force pour moi. Dans une autre vie, c'eût été un intello un peu baveux, caractéristique de la famille. Mais il avait vécu dans ce monde où le labeur se comparait et à la charrue et à ses boeufs.
Jour après jour, année après année, il se levait aux petites heures pour nourrir son foyer. Il n'avait rien connu d'autre, et il ne connaitrait résolument jamais rien de moins. Ce monde de travaillants extrêmes m'intimide, m'impressionne, m'inspire. Je pense également à mon père qui, je le réalise de plus en plus, lui a emboité le pas.
Et j'entre sur le marché du travail dans des conditions dont ils n'auraient jamais prié pour eux-mêmes. Je réprime un chagrin ému d'avoir le gâteau pour moi après leurs vies (et celles de combien de leurs pères avant eux?) d'investissement pour le futur de leurs fils, de leurs familles.
Il ne me reste qu'à faire de mon mieux pour partager ce qu'ils m'ont appris, ce que j'ai étudié et ce que la vie m'a appris, pour en faire profiter les générations qui me survivront. À perpétuer l'histoire d'accomplissements et de progrès que mes pères me lèguent.
À mériter mon sang et les rendre aussi fiers de me passer leur flambeau que je suis fier de l'attraper.
@L'ours qui a vu l'homme : Tu peux écrire un livre si tu veux.
@La moumoune tapageuse : Tu dois être le genre de personne à pardonner après t'être fait zigouiller toi ?
Je vais faire la même chose ce vendredi et ça ne me tente pas vraiment. J'ai vraiment trippé dans mon emploi d'été, mais il est temps pour moi de retourner sur les bancs de l'école... Je te comprends!
@rachel: En effet, débusqué ces gens qui rendront la vie plus intéressante.
@Jean-Paul: Une allégorie qui sait bien refléter la situation.
@pinocchio: Ça sonne un peu mononcle saoul au jour de l'an mais quand même, merci des bons voeux.
@sophia: Non c'est sur, c'est sans doute la gestion de la "rupture" qui est à améliorer parce que fondamentalement, je suis bien conscient que ce n'est pas mal d'aimer les gens. On contraire, je devrais sans doute m'efforcer de le faire plus souvent.
@l'ours: Je me répète en disant que j'adore ton écriture et tes idées. C'est vrai qu'on se doit de réaliser la chance que l'on a de travailler dans des domaines où le physique n'est pas éprouvé, dans des trucs stimulants. De songer à ses quantités de gens qui ont travaillé si dur, si longtemps et si fort avant nous pour lentement paver la voie vers le monde que nous connaissons aujourd'hui, je trouve ça inspirant.
@gui92: C'est important de savoir pardonner dans la vie non?
@p'tit homme: Au moins j'ai vraiment hâte de recommencer l'école, je met le focus sur ça.
J’ai sincèrement apprécié cet article qui apporte une véritable aide.
Enregistrer un commentaire